- Le scanner
Le scanner constitue l’examen de choix. En effet, compte tenu de la forte prévalence de la symptomatologie respiratoire au cours des infections par le Covid19, et grâce à sa bonne valeur prédictive positive (65%) et sa très bonne valeur prédictive négative (83%), le scanner thoracique constitue l’examen le mieux adapté pour le bilan des lésions pulmonaires dues au Covid19.
Certaines publications font état de l’existence de lésions extra thoraciques :
- Encéphaliques notamment sous forme de foyers hémorragiques thalamiques, indiquant une exploration IRM
- Cardiaques sous forme de tableaux cliniques pouvant parfois être proche de la présentation de l’infarctus, de l’insuffisance cardiaque ou des myocardites indiquant une exploration adaptée, complétée au besoin par une IRM cardiaque pour les suspicions de myocardites.
- Digestives, ORL et dermatologiques.
La radiographie standard : Par sa faible sensibilité et sa faible spécificité, la radiographie thoracique n’a aucune place dans le diagnostic précoce. Elle sera réalisée chez les patients de réanimation non transportables ou pour la recherche d’autres diagnostics différentiels (pneumothorax, œdème pulmonaire ou pneumonie)
L’échographie thoracique : Il s’agit d’un examen opérateur dépendant, nécessitant une courbe d’apprentissage non négligeable et surtout un contact prolongé avec le patient ce qui augmente le risque de contamination pour l’opérateur. Sa pratique doit être limitée aux unités de soins intensifs et de réanimation pour les patients non transportables à la recherche des complications de ventilation (pneumothorax) et l’évaluation des épanchements pleuraux.
Références :
- Bitterman R., Eliakim-Raz N., Vinograd I., Zalmanovici Trestioreanu A., Leibovici L., et al.
- https://srlf.org/wp-content/uploads/2020/03/Recommandations-dexperts-COVID-19- 10-Mars-2020.pdf
- Geoffrey D. Rubin, and all, The Role of Chest Imaging in Patient Management during the COVID-19 Pandemic: A Multinational Consensus Statement from the Fleischner Society, Radiology, In press
- Zheng Y-Y, Ma Y-T, Zhang J-Y, Xie X. COVID-19 and the cardiovascular system. Nature Reviews Cardiology 2020.
Le scanner peut-être normal à la phase précoce, durant les 3 premiers jours.
Réalisé sans injection de produit de contraste en acquisition spiralée, le scanner thoracique permet de redresser le diagnostic chez 33% des patients avec RT-PCR négative.
Les lésions le plus fréquemment retrouvées, dites « Compatibles COVID » sont (Figure 1):
- Lésions en verre dépoli en plages, bilatérales présentant une répartition périphérique et plutôt basale (Fig. 1a)
- Aspect d’épaississement en « pavé » ou Crazy paving (Fig. 1b),
- Plages de condensations (Fig. 1c, 1e, 1f), aspect de halo inversé
- Lignes sous pleurales
Certains signes sont inhabituels, dits « pas compatibles COVID »:
- Épanchement pleural (1d), secrétions endobronchiques
- Micronodules centro-lobulaire,
- Excavations, Condensation systématisée
- Adénopathies médiastinales
Afin de donner une orientation concernant le degré de suspicion Covid19, le médecin radiologue doit utiliser un lexique CORADS : Covid Raw data system, tel que détaillé dans le tableau ci-dessous (tableau 1).
Dès que le diagnostic est évoqué, il convient d’estimer l’étendue lésionnelle dans un but pronostic et évolutif. L’évolution des lésions peut se faire vers la régression spontanée avec nettoyage radiologique ou vers l’extension des lésions vers un SDRA avec poumon blanc.
On définit 4 degrés en fonction de l’étendue des lésions parenchymateuses Covid compatibles, (Fig. 2) :
- Absent – minime : <10% du parenchyme pulmonaire (Fig. 2a)
- Modéré : 10-25% du parenchyme pulmonaire (Fig. 2b)
- Étendu : 25-50% du parenchyme pulmonaire
- Sévère : >50% du parenchyme pulmonaire (Fig. 2c)
- Critique : >75% du parenchyme pulmonaire
Parallèlement, on distingue au cours de l’évolution de l’atteinte pulmonaire, 4 stades scanographiques (Fig. 3):
- Stade précoce (jusqu’aux 4 premiers jours) : opacités en verre dépoli
- Stade intermédiaire (5-8j) : extension des plages de verre dépoli, confluence, organisation de condensations et apparition d’opacités linéaires
- Stade tardif (8-13j) : diminution des plages en verre dépoli au profit des condensations et des opacités linéaires
- Stade tardif (au-delà de 14j) : régression progressive des anomalies
Certains articles ont souligné l’intérêt de l’intelligence artificielle, grâce au deep learning, dans l’établissement du diagnostic et du suivi des lésions parenchymateuses pulmonaires au cours du Covid19 (Fig. 4)
Références :
- Xie X, Zhong Z, Zhao W, Zheng C, Wang F, Liu J. Chest CT for Typical 2019-nCoV Pneumonia: Relationship to Negative RT-PCR Testing. 2020 Feb 12:200343.
- Adam Bernheim et al Chest CT Findings in Coronavirus Disease-19 (COVID-19): Relationship to Duration of Infection.. RSNA Radiology ; mis en linge le 02 février 2020 ;
- Tao Ai et al; Correlation of Chest CT and RT-PCR Testing in Coronavirus Disease 2019 (COVID-19) in China: A Report of 1014 Cases.. Feb 26 2020https://doi.org/10.1148/radiol.2020200642
- Yuhui Wang et al Temporal Changes of CT Findings in 90 Patients with COVID-19 Pneumonia: AA Longitudinal Study. Radiology In press
- Mining Xia and all; Serial Quantitative Chest CT Assessment of COVID-19: Deep-Learning Approach, Cardiothoracic Imaging, Radiology, In press
- Compte rendu type du scanner thoracique pour suspicion d’une pneumopathie virale à COVID-19:société Marocaine de Radiologie Interventionnelle (SMRI). 2020
Dans une récente analyse des données chinoises, Il a été constaté que les patients atteints de cancer présentaient un risque plus élevé de COVID-19 que la population générale et que les formes observées étaient statistiquement plus sévères, ce qui devrait nous inciter à accorder une attention plus soutenue aux patients atteints de cancer.
En effet, en cette période de pandémie et de fortes restrictions de déplacements des patients, il est fortement recommandé de favoriser l’information et la communication avec les patients à travers les nouvelles technologies de l’information dans le cadre de la Télémédecine.
Quant à la sémiologie lésionnelle observée au cours des infections au Covid19 chez les patients cancéreux, elle ne présente aucune spécificité et demeure superposable à celle observée chez la population générale.
Toutefois, la relative fréquence de remaniements parenchymateux pulmonaires chez les patients cancéreux devrait inciter les radiologues à plus d’attention dans l’analyse sémiologique des lésions parenchymateuses observées chez ces patients.
En effet, elles peuvent porter à confusion avec les lésions observées au cours du Covid19 et particulièrement les lésions de fibrose et de distorsion parenchymateuse.
- Les pneumopathies interstitielles aiguës ou subaiguës, observées avec les chimiothérapies, les inhibiteurs des points de contrôle de l’immunité (nivolumab…), les anticorps monoclonaux (rituximab, le trastuzumab), et les inhibiteurs de la voie de signalisation mTOR.
- Leur symptomatologie respiratoire est non spécifique ; faite de dyspnée, toux et parfois fièvre.
- Le scanner retrouve plusieurs formes radiologiques: Pneumopathie organisée, pneumopathie d’hypersensibilité, pneumopathie interstitielle non spécifique ou mixtes (Fig. 5,6).
- Les pneumopathies radiques, apparaissant généralement trois semaines à six mois après la fin de l’irradiation sous forme de lésions très focalisées aux champs d’irradiation.
- Il est également décrit les pneumonies radiques de rappel (radiation recall pneumonitis), survenant habituellement en territoire irradié, déclenchées par l’administration ultérieure d’une chimiothérapie.
Références
- Zhang L, Zhu F, Xie L, Wang C, Wang J, Chen R, Jia P, Guan HQ, Peng L, Chen Y, Peng P, Zhang P, Chu Q, Shen Q, Wang Y, Xu SY, Zhao JP, Zhou M, Clinical characteristics of COVID-19-infected cancer patients: A retrospective case study in three hospitals within Wuhan, China, Annals of Oncology (2020), doi: https://doi.org/10.1016/j.annonc.2020.03.296.
- Harold Litt and all, Radiological Society of North America Expert Consensus Statement on Reporting; Chest CT Findings Related to COVID-19. Endorsed by the Society of Thoracic, Radiology, the American College of Radiology, and RSNA, Cardiothoracic Imaging, Radiology, In press
- Toxicité pulmonaire des médicaments : ce que le réanimateur doit connaître ? Drug-Induced Lung Toxicities: What the Intensivist Should Know?
Parrot · A. Gibelin · T. Issoufaly · G. Voiriot · M. Djibré · J.M. Naccache · J. Cadranel · M. Fartoukh; Méd. Intensive Réa (2018) 27:45-56; DOI 10.3166/rea-2018-0012
- Naidoo, JCO 2016; Hwang, JAMA Oncol2017; Antonia, NEJM 2017
- Naidoo, JCO 2016; Delaunay ERJ 2017
- B. Ghaye, M. Wanet et M. El Hajjam ; Imagerie après radiothérapie des tumeurs thoraciques, Journal de radiologie diagnostic et interventionnelle (2016) 97, 461-477
Le maintien ou le report des examens d’imagerie à visée diagnostique ou dans le cadre de l’évaluation, doit être considéré en tenant compte de leur importance et de leur impact dans la stratégie thérapeutique et ce en parfaite concertation avec les médecins traitants et des recommandations des différentes sociétés savantes.
L’enjeu serait de proposer des attitudes concertées et surtout uniformisées aux patients atteints de cancer en tenant compte des contraintes épidémiologiques et sanitaires locales liées à l’organisation des soins en période de pandémie.
La réalisation d’acte de radiologie interventionnelle et d’imagerie dans le cadre des urgences thérapeutiques, ne saurait être reporté et doit faire l’objet d’une RCP. L’équipe de radiologie doit pour sa part veiller à assurer la sécurité du circuit patient et à respecter les conditions de pratique des actes d’imagerie et de radiologie interventionnelle.
Il est bien évident que les programmes de dépistage organisés devraient être suspendus pendant cette période.
Références :
- Mejean A, Roupre et M, Rozet F, Bensalah K, Murez T, Game X, Rebillard X, Mallet R, Faix A, Mongiat-Artus P, Fournier G, Neuzillet Y, Recommandations CCAFU sur la prise en charge des cancers de l’appareil urogénital en période d’épidémie au Coronavirus COVID-19, Progrès en Urologie (2020), doi: https://doi.org/10.1016/j.purol.2020.03.009
- Recommandations pour la prise en charge chirurgicale des cancers gynécologiques en période de pandémie COVID-19, Groupe FRANCOGYN pour le CNGOF, (23 mars 2020)
- COVID-19 and breast cancer population : French guidelines for clinical practice of Nice-St Paul de Vence, in collaboration with the Collège Nationale des Gynécologues et Obstétriciens Français (CNGOF), the Société d’Imagerie de la Femme (SIFEM), the Société Française de Chirurgie Oncologique (SFCO), the Société Française de Sénologie et Pathologie Mammaire (SFSPM) and the French Breast Cancer Intergroup-UNICANCER (UCBG), Joseph Gligorov, Institut Universitaire de Cancérologie AP-HP. Sorbonne Université, Paris, France. https:/doi.org/ 10.1016/j.bulcan.2020.03.008
- Denys A, et al. Interventional oncology at the time of COVID-19 pandemic: Problems and solutions.Diagnostic and Interventional Imaging (2020), https://doi.org/10.1016/j.diii.2020.04.005ARTICLE IN PRESSG ModelDIII-1306